La dépression… point d'exclamation ou point d'interrogation ?
Telle est la question que pose le numéro 5 hors-série de la revue Hypnose et Thérapies Brèves.
La réponse demande une analyse fine, en effet elle dépasse le cadre strictement chimique d'un déséquilibre hormonal, elle questionne le mal être d'un sujet qui, dans l'inertie et le vide existentiel, est figé dans son élan vital. La réponse est donc de lui redonner "goût à la vie", en "conceptualisant" dans son contexte le parcours du patient.
La contribution des différents auteurs montre des approches personnelles qui ont des valeurs d'exemples et nourrissent la réflexion. Cependant, il est à noter qu'ils se réfèrent tous à la recherche de la capacité du patient, à pouvoir "métaphoriser" sa souffrance afin de s'en détourner. Cette aptitude permet de lutter contre "l'arrêt du temps intérieur". Toutefois, la dépression ne peut se résumer à un immobilisme psychique, elle révèle parfois une fracture par rapport à un moi-idéal et l'impossibilité de remplir son contrat… et chose importante un conflit de loyauté, en particulier chez les enfants quand ceux-ci ne peuvent répondre à l'attente parental
Aussi quand la demande est-elle trop grande et impossible à satisfaire, la solution thérapeutique passe par un travail sur le "vécu de trahison"…Ainsi, avec l'aide du thérapeute, le patient doit réapprendre à s'aimer, à se reconstruire, valider un projet de vie pour réentrer dans le monde.
Le changement succède dès lors, à l'immobilisme et la vie reprend son rythme…
Néanmoins, une question subsiste, quel sens la dépression peut-elle avoir ? Est-elle absurde ?
La notion de l'Acédie ouvre une perspective sur la dépression comme "une extinction de la voie intérieure" comme le définit J.A MALAREWICZ.
L'Acédie est la description par Evagre le Pontique au IV ème siècle du "Mal-Être" des moines; ceux-ci, saisis par un manque d'ardeur à leurs pratiques religieuses, devenaient soit indolents, passifs, négligents, soit continuellement agités, en tout cas, malgré leurs vœux, ils n'étaient plus présents dans le service de Dieu.
Dans une logique religieuse, ce relâchement de la foi interroge le Démon tentateur… et appelle à l'exorcisme ou au renforcement de l'ascèse. Toutefois, ce mal se diffuse hors des couvents, tout au moins dans sa description clinique et ses raisons deviennent autres, l'Acédie devient laïque et trouve sa cause dans la psyché, elle change de nom, devient mélancolie, "spleen", dépression, P.M.D… De vice, elle devient maladie, de cette façon, elle échappe au châtiment, elle gagne au change, un traitement.
L'objectivation et les conférences de consensus, renvoient à l'universel, et le malaise dans la civilisation perd de son pouvoir de subjectivité.
La "dépression" quitte, alors, peu à peu, son statut d'existentiel pour devenir trouble mental, tandis que la science s'en mêle par sa volonté normative, le symptôme devient syndrome, puis maladie avec protocole. Le risque c'est d'oublier d'écouter le patient, il demande aussi d'être accompagné : être Homme parmi les Hommes… Peut-être est-ce cette requête, le fin de mot de l'Histoire, qui ouvre le débat ?
Dr B...
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